La Charte montréalaise des droits et responsabilités (la « CMDR ») est un règlement assez unique et novateur qui confirme officiellement les engagements de la Ville de Montréal à l’égard de ses citoyens : elle est malheureusement peu connue des Montréalais(es). Permettez-nous de vous en faire découvrir différentes facettes.
Origine et Contenu
Lors du Sommet de Montréal de 2002, la société civile manifeste son besoin d’avoir une charte confirmant les droits des citoyens dans la Ville ainsi que les valeurs partagées par la Ville et par ses résidents. L’administration municipale s’engage à donner suite à cette demande.
Plusieurs citoyens, experts et membres du Chantier sur la démocratie s’attellent alors à la tâche : ils conjuguent leurs efforts pour définir le contenu de cette nouvelle Charte montréalaise des droits et responsabilités qui entrera en vigueur le 1er janvier 2006. La CMDR est par la suite améliorée en 2011 puis en 2017.
La CMDR lie tous les intervenants de la Ville de Montréal : ville centre, arrondissements, employés, élus et mandataires. Son approche novatrice inclut la reconnaissance de droits, mais également de responsabilités citoyennes; elle précise également les engagements de la Ville qui sont rattachés à ces droits.
Ces droits, responsabilités et engagements sont classés dans sept grands thèmes :
- Vie démocratique: participation citoyenne, droit d’initiative, consultations publiques, accès à l’information, égalité homme-femme, accès à la fonction publique, représentation des minorités, lutte contre la discrimination, l’exclusion et la pauvreté, etc.
- Vie économique et sociale: accès et salubrité des logements, lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, accès à l’eau potable, etc.
- Vie culturelle: patrimoine culturel (bibliothèques, musées, etc.) et naturel, promotion de la création, développement et diversité des pratiques culturelles, etc.
- Loisir, activité physique et sport: promotion d’un mode de vie actif, qualité, répartition équitable et accessibilité des parcs et des infrastructures de loisirs et de sports, etc.
- Environnement et développement durable : conciliation de la protection de l’environnement et du patrimoine bâti avec le développement économique, social et culturel, qualité de l’eau, du sol et de l’air, augmentation des ilots de fraicheur, accès aux rives et aux espaces verts, préservation de la biodiversité, protection de la forêt urbaine, contrôle des nuisances (odeurs, circulation, bruit), développement durable, etc.
- Sécurité : aménagement sécuritaire du territoire, sécurité publique et civile, protection de l’intégrité des personnes et des biens, etc.
- Services municipaux : souplesse, compétence et respect dans la dispense de services municipaux, propreté du domaine public, accessibilité universelle, sécurité de l’accès au domicile et au trottoir, etc.
Quels sont vos recours si vous croyez qu’un engagement n’est pas respecté?
La CMDR ne peut pas faire l’objet d’un recours judiciaire ni être invoquée devant un tribunal.
Le seul recours disponible, pour assurer le respect de la CMDR, est une plainte à l’OdM : notre bureau a d’ailleurs le devoir d’interpréter toute la réglementation municipale d’une manière qui est compatible avec les engagements contenus dans la CMDR.
Un aspect très exceptionnel de cette Charte est qu’elle permet à l’OdM, lorsqu’un engagement de la CMDR est en cause, de faire enquête et d’émettre des recommandations même à l’égard de décisions votées par le Conseil municipal, le Comité exécutif ou un Conseil d’arrondissement. Un tel pouvoir sur les décisions des élus est très rare : en effet, les ombudsmans n’ont généralement juridiction que sur l’appareil administratif de l’administration publique.
La CMDR en statistiques
Entre 2006 et 2018, 26,15 % des enquêtes approfondies réalisées par l’OdM ont trait à un engagement de la CMDR.
Les engagements de la CMDR les plus fréquemment en jeu concernent l’environnement et le développement durable (310/678) et la qualité des services municipaux (204/678).
Pour obtenir d’autres statistiques concernant les interventions de notre bureau au fil des ans, vous pouvez consulter nos Rapports annuels et leur cahier d’annexes, sur notre site Internet.
Des exemples de dossiers impliquant la CMDR
Accessibilité universelle des terrasses et autres lieux publics – Engagement prévu à l’article 28 f)
« Aux fins de favoriser la jouissance par les citoyennes et les citoyens de leur droit à des services municipaux de qualité, la Ville de Montréal s’engage à : […]
f) favoriser l’accessibilité universelle dans l’aménagement du territoire, dans l’accès aux édifices ainsi que dans les communications, programmes et services municipaux en général. »
En 2013, l’OdM constate que certaines terrasses de l’arrondissement de Ville-Marie ne sont pas universellement accessibles : absence de rampe d’accès ou rampe impraticable; dégagement insuffisant pour que les personnes à mobilité réduite puissent circuler, etc. L’OdM amorce alors une série d’interventions et de suivis pour que ces lacunes soient corrigées.
L’arrondissement améliore graduellement son approche et intensifie ses suivis. Ces efforts portent fruit. À l’été 2015, nous notons des améliorations marquées. Ce dossier spécifique est fermé.
Notre bureau demeure, néanmoins, vigilent, afin que les normes et bonnes pratiques en matière d’accessibilité universelle soient intégrées dès la conception du projet. Nous portons une attention particulière aux différents projets de la Ville et intervenons en amont auprès de la Ville dans une optique de sensibilisation et de conscientisation.
Dans certains cas, l’accessibilité universelle est intégrée dès la conception des projets. Dans d’autres cas, notre intervention permet d’en assurer l’intégration : réaménagement du Parc Jean Drapeau, hauteur des bornes de stationnement, aménagement de l’Hôtel-de-Ville (rampe d’accès, garage, salle de bains), réaménagement de la Place Vauquelin, aménagement du Quartier de spectacles, trottoir de la rue Brébeuf en bordure du Parc Laurier, etc.
Nuisances de circulation – Engagement prévu à l’article 24 g)
« Aux fins de favoriser la jouissance par les citoyennes et les citoyens de leurs droits en matière d’environnement et de développement durable, la Ville de Montréal s’engage à :
g) prendre des mesures visant à limiter les nuisances abusives issues du bruit et de la circulation, contrôler celles découlant du dépôt des ordures et promouvoir auprès des citoyennes et des citoyens un comportement civique responsable et respectueux des milieux de vie et de l’environnement; »
25 résidents d’une avenue achalandée se plaignent des bruits excessifs et des fortes vibrations dans leur maison, qu’ils attribuent à différentes causes :
- Abondance de camions sur cette rue, alors que seulement la circulation locale est permise;
- Mauvais état de la chaussée;
- Passage fréquent d’autobus en transit; et
- Vitesse excessive de la circulation.
Notre enquête confirme tous ces problèmes.
Grâce aux efforts combinés de l’arrondissement et du poste de quartier du SPVM, plusieurs problématiques sont réglées ou atténuées :
- L’arrondissement procède au resurfaçage de la chaussée;
- Le PDQ intensifie sa surveillance pour mieux gérer les excès de vitesse et le passage fréquent de camions non autorisés; et
- La STM réduit le nombre d’autobus circulant sur cette rue.
Les résidents confirment une réelle amélioration de leur qualité de vie : diminution du bruit, réduction de la densité et de la vitesse de la circulation, moins de vibrations dans les maisons.