Un citoyen a déposé une plainte à l’Ombudsman de Montréal afin que le Festiblues soit déménagé dans un autre arrondissement parce qu’il ne voulait plus en subir les désagréments. Il s’appuyait, entre autres, sur la Charte montréalaise des droits et responsabilités dont, principalement, les engagements qui y sont pris de limiter les nuisances découlant du bruit excessif et de la circulation.
Le citoyen se plaignait du bruit, durant les spectacles et les tests de son, de la malpropreté du site, de la présence de verre brisé, du comportement des festivaliers, de l’achalandage important ainsi que du fait que, durant une semaine complète, les résidants de l’arrondissement d’Ahuntsic–Cartierville étaient privés d’accès au parc Ahuntsic.
Nous avons discuté du dossier avec les gestionnaires de l’arrondissement et du poste de police du quartier ainsi qu’avec des membres du conseil d’administration du Festiblues. Nous avons également visité le parc Ahuntsic.
Notre enquête a révélé que, depuis 2003, plusieurs mesures ont déjà été mises en œuvre pour atténuer les désagréments subis par les citoyens : entre autres, l’orientation des haut-parleurs a été modifiée et des mesures de bruit sont prises régulièrement pour s’assurer que les niveaux atteints, lors des spectacles, demeurent acceptables. Aucune bouteille de verre n’est tolérée sur le site du festival: les sacs des spectateurs sont fouillés à l’entrée du site et tous les contenants de verre sont immédiatement confisqués.
Le Festiblues dure quatre jours mais deux jours additionnels sont nécessaires à la mise en place et au démantèlement des équipements. Durant toute cette période, deux tiers du parc sont réservés à cette activité, mais l’autre tiers reste accessible en tout temps, pour tous les citoyens.
Le Festiblues a été créé par une équipe d’intervenants travaillant auprès des jeunes du quartier. Cette entreprise «d’économie sociale» accorde une place prépondérante à la jeunesse et à la famille. En plus d’offrir les opportunités d’un concours musical à la jeune relève, elle permet aux adolescents et aux enfants du quartier de participer à diverses activités artistiques adaptées à leur âge.
Le Festiblues embauche 150 jeunes de l’arrondissement, certains ayant eu un parcours difficile, à qui il permet d’acquérir une expérience de travail, dans un encadrement professionnel reconnu.
Les droits d’entrée sont minimes, mais les spectateurs sont invités à faire un don. À ce jour, plus de 120 000 $ ont été ainsi amassés puis remis à des organismes communautaires locaux.
Un sondage effectué en 2005 auprès des festivaliers a confirmé qu’environ la moitié des participants habitent l’arrondissement d’Ahuntsic–Cartierville.
Le citoyen alléguait la Charte montréalaise des droits et responsabilités, mais cette Charte contient aussi un engagement de la Ville à favoriser la prise en charge de leur milieu par les citoyennes et citoyens en vue de contrer la pauvreté et l’exclusion sociale (art. 18). Il fallait donc, dans ce dossier, rechercher l’équilibre entre les droits individuels et les droits de la collectivité.
Vu ce qui précède et considérant que les gestionnaires de l’arrondissement et du Festiblues ont toujours collaboré pleinement pour limiter, autant que possible, les nuisances pouvant découler de ce festival, l’Ombudsman de Montréal a conclu qu’il n’y avait pas lieu de recommander le déménagement de cette activité culturelle importante, à laquelle les citoyens du quartier ont l’opportunité d’assister, à un coût minime, à proximité de leur résidence.
En plus du maintien des améliorations apportées depuis 2003 dans l’organisation du festival, l’Ombudsman de Montréal a néanmoins obtenu des responsables du Festiblues un engagement additionnel pour que, dès 2006, les périodes de tests de son, en après-midi, soient écourtées, ce qui fut fait.